L’actualité est là pour le rappeler, l’océanographie opérationnelle s’impose résolument dans notre quotidien. La France occupe dans ce domaine en pleine émergence au niveau international une place de premier rang avec l’équipe MERCATOR OCEAN. Assurant une modélisation continue de l’océan dans ses trois dimensions et en temps réel, les prévisionnistes français de MERCATOR OCEAN (http://www.mercator.com.fr) donnent depuis Toulouse des informations sur la position et l’intensité des courants marins, sur la température et la salinité en surface comme en profondeur avec des prévisions jusqu’à 2 semaines.

Les applications d’un tel service sont déjà nombreuses. Ces dernières semaines, MERCATOR OCEAN s’est en particulier mobilisé sur deux événements majeurs : la marée noire consécutive au naufrage du Prestige et la route du Rhum.

La marée noire du Prestige

Le 13 novembre 2002, le pétrolier Prestige est victime d’une avarie au large du Cap Finisterre (Espagne). Le 19 novembre, il coule au large des côtes de Galice par 3500 mètres de profondeur avec environ 50 à 60 000 tonnes de fuel lourd dans ses cuves. Commence alors la troisième marée noire dans les eaux européennes en trois ans, après celles de l’Erika en 1999 et du Baltic Carrier en 2001. Les dégats écologiques sur les écosystèmes marins et côtiers sont considérables. Ceux à venir sont redoutables : quatre semaines après l’accident, le fuel s’échappe par les nombreuses fissures de la coque, à raison de quelques 125 tonnes par jour. La pollution pourrait donc durer pendant de longs mois et s’étendre sur une grande partie de la façade atlantique. Dans ce cadre, une étude et une prévision de l’état de l’océan (température, courants) en 3 dimensions peut contribuer au suivi de la pollution et à la mise en place des moyens de protection. Ainsi, la connaissance des courants sur toute la profondeur peut s’avérer capitale pour déterminer l’endroit où le pétrole risque d’émerger et de souiller les côtes, d’autant que la zone du naufrage est située dans le courant du Portugal, assez turbulent y compris en profondeur.

Sollicité dès les premières heures de ce drame, MERCATOR Océan fournit depuis le 20 novembre les cartes de prévisions de température et courants à plusieurs organismes (Cedre, Météo France, Shom, Ifremer), acteurs majeurs dans la gestion de cette crise. Ainsi, chaque mercredi, Mercator propose les cartes de prévisions pour les 15 jours à venir issues de son nouveau modèle haute résolution (~6 km de maille), Psy2. Dans le même temps, un travail de statistiques sur les sorties du prototype Psy1 (moyenne résolution, opérationel depuis janvier 2001) permet de mieux comprendre la dynamique océanique de la zone du naufrage.

Cette information, délivrée à titre expérimental, est issue de systèmes d’océanographie opérationelle récents et novateurs. Ils sont basés sur des modèles numériques tridimensionnels de l’océan, dans lesquels sont injectés les observations in-situ et spatiales, en particulier celles du satellite d’altimétrie JASON-1 (collaboration franco-américaine CNES/NASA).

Une telle information sur l’état thermodynamique de l’océan, décrit dans ses 3 dimensions, en temps réel et en prévision n’était pas disponible il y a encore 3 ans, au moment du drame de l’Erika !

La Route du Rhum

A l’occasion de la Route du Rhum 2002, traversée en solitaire de l’Atlantique, les océanographes de MERCATOR OCEAN ont élaboré une version inédite de leur bulletin de prévision océanique et ont mis en place trois types d’action : une collaboration avec les routeurs de Météo-France, un site Web mis à jour quotidiennement avec les cartes de prévisions de courants en collaboration avec le site officiel de la course et un service à la carte au navigateur Joé Seeten,classé troisième en catégorie monocoque 60′.

Pour cette dernière activité, MERCATOR OCEAN proposait une analyse quotidienne des courants marins à une équipe de l’Université du Littoral – Côte d’Opale qui coordonnait les activités de routage de Joé Seeten.

A Dunkerque, l’équipe de l’Université du Littoral-Côte d’Opale* qui, associée à un prévisionniste de Météo Consult, gérait le routage de Joé SEETEN, avait ainsi pu définir un certain nombre de zones situées sur l’orthodromie –route la plus courte entre la Manche et la Guadeloupe- où des courants d’un nœud (1,852 km/h) ou plus pouvaient freiner la vitesse des concurrents, ou infléchir négativement leur trajectoire. Des compromis vitesse, vents et courants avaient pu être élaborés, définissant des routes optimales.

Les dépressions situées sur la Grande Bretagne et le Cap Finisterre, et qui conditionnaient la sortie de Manche, se sont avérées dès le départ très creuses ; les paramètres force du vent et houle sont alors devenus prépondérants dans les choix de route –route sud proche des Açores en l’occurrence-, les courants devenant sur ces zones et dans ces conditions secondaires.

Après le passage de ces îles, et jusqu’à environ 800 milles des Antilles, les courants rencontrés étaient faibles, de l’ordre de 0,3 nœuds. Cependant, la route suivie étant proche de l’axe du vent arrière, qui était par ailleurs soutenu, les voiliers durent enchaîner les empannages (virements de bord, le vent venant de l’arrière). Ces manœuvres étant difficiles, dangereuses et entraînant une perte de temps, l’équipe de l’ULCO (E-mail : Denis.Theunynck@univ-littoral.fr, Site Web : http://seeten.univ-littoral.fr) mit à profit différentes veines de courant afin de positionner ces manœuvres dans des zones de courant portant, diminuant leurs coûts ” temps “.

Enfin, à l’approche de la Guadeloupe, Ellen Mac Arthur et Mike Golding durent naviguer dans un courant contraire de 0,8 nœuds, lié au tourbillon anticyclonique qui régnait sur cette zone.

De son coté, Joé SEETEN et son équipe mirent à profit les informations fournies journellement par Mercator pour choisir une trace de route qui permette à la fois de contrôler Roland Jourdain, un autre concurrent, tout en se plaçant sur une trajectoire qui soit un bon compromis vent et courant.

Cette intégration de plusieurs sources de données leur a permis de maintenir Joé SEETEN à la 3ème place jusqu’à l’arrivée, après 16 jours de course, et avec un écart constant de 80 milles sur le 4ème.

En savoir plus sur MERCATOR OCEAN

MERCATOR OCEAN est un Groupement d’Intérêt Public créé à Toulouse début 2002 par le CNES, le CNRS, l’IFREMER, l’IRD, Météo-France, et le SHOM, six organismes français acteurs majeurs de l’océanographie.

Ces mêmes organismes, avec l’appui de deux de leurs filiales, CERFACS et CLS, s’étaient lancés en 1995 un défi audacieux : inventer, développer et mettre en place en 7 ans le premier système d’océanographie opérationnelle français, un système unique capable de décrire, analyser et prévoir en temps réel l’océan global, capable à tout instant, et dans tous les recoins de notre planète de décrire l’état de l’océan, en surface comme en profondeur, dans les zones hospitalières ou non.

Le défi fut relevé dans les temps avec le 17 janvier 2001, l’émission du premier bulletin MERCATOR, décrivant avec 15 jours d’avance l’état complet de l’Atlantique Nord. Le bulletin Mercator s’enrichit désormais chaque semaine de 800 nouvelles cartes, élaborées par ces nouveaux prévisionnistes. C’est sur les bases de ce premier succès que s’est construit la structure MERCATOR OCEAN, entièrement dédiée à l’océanographie opérationnelle.

Sa mission ? Enrichir constamment le service offert par ce nouveau système d’océanographie opérationnelle en augmentant la résolution des modèles utilisés (c’est chose faite avec ce nouveau modèle de maille 6 km) et la couverture géographique (les premiers modèles couvrant l’océan global seront mis en œuvre en 2003) … et mettre en place à Toulouse dans les 4 ans qui viennent un véritable Centre d’Océanographie Opérationelle d’ambition européenne.

L’objectif est ainsi défini :

1.

Développer un système d’océanographie opérationnelle via la mise en œuvre d’un système de simulation tridimensionnelle, basé sur un modèle aux équations primitives à haute résolution en prenant en compte par assimilation les données satellites (en particulier celles issues du programme d’altimétrie satellite JASON) et in situ (en particulier les mesures in situ collectées par le centre CORIOLIS) d’observation de l’océan.
2.

Permettre le développement d’applications pour la marine marchande ou militaire ou une exploitation durable des ressources océaniques, la recherche océanographique, la sécurité en mer, la surveillance ou la protection de l’environnement sans oublier l’importance de développer notre connaissance du rôle de l’océan dans l’équilibre du climat.
3.

Contribuer au succès de l’expérience internationale de GODAE ( GLOBAL OCEAN DATA ASSIMILATION EXPERIMENT ) d’océanographie opérationnelle qui se déroulera de 2003 à 2005 avec l’élaboration en routine et en temps réel d’analyses et de prévisions de l’océan global.

MERCATOR, contribution française à cette expérience internationale, figure d’ores et déjà parmi le groupe de tête des équipes capables à travers le monde de relever un tel défi. Le Centre d’Océanographie Opérationnelle de Toulouse s’impose comme un acteur majeur de la discipline.

Contacts :

  • MERCATOR OCEAN
  • Pierre BAHUREL, Directeur
  • http://www.mercator.com.fr
  • Adresse : GRGS/LEGOS, 18, av. E. Belin , 31401 TOULOUSE Cedex, France
  • Tél : +33 5 61 33 29 76
  • Fax : +33 5 61 33 29 16
  • E-mail : Pierre.Bahurel@mercator.com.fr